Lettre de Paris

Chère famille, chers ami(e)s :

Les moments que nous sommes en train de vivre en France sont indescriptibles. La peur, le chagrin, la rage ont envahi toute la société de ce pays qui, depuis neuf ans, est ma maison. Toute tentative d’écrire ou de prononcer les mots justes est entièrement triviale. Le seul sens que j’ai pu trouver à la masacre du vendredi dernier est celui de l’horreur. L’horreur profond et non mérité qui a finit avec la vie de dizaines de personnes.

Le chagrin et la peur qui m’envahissent, comme vous l’imaginez probablement, je les partage avec des milliers de personnes dans cette ville. Nous la partageons avec des gens de tout le monde, de toutes origines, croyants ou pas. Paris nous permet de l’appeler notre ville, sans se soucier d’où nous sommes originaires. Il ne faut pas être né ici, ni dans ce pays pour ressentir à la première personne le moment si obscur que nous traversons. Il suffit de penser à toute la beauté disparue à cause de la haine afin de ressentir les larmes qui montent aux yeux et que le cœur s’alourdit, tel un coup sur la poitrine, sec et bien placé. Toute cette beauté qui a disparue au bout de quelques minutes : des jeunes et des adultes, des couples, des artistes, l’atmosphère de ces quartiers parisiens. Tout au long de ma vie, je n’avais jamais ressenti l’importance des choses banales, des activités qui deviennent précieuses au point d’y laisser la vie : la beauté d’un café sans histoires, d’un resto, d’un match de foot. Toute cette beauté devenue la peur, l’horreur et le vide. La paralyse et l’impuissance.

La chose la plus intelligente à fair, pour l’instant, est de ne pas changer notre forme de vie. Refuser à emprunter la route de la peur que des fanatiques ont signalée, achevant des centaines de vies. La chose la plus courageuse est de continuer, sans pourtant oublier les victimes et ses familles, avec l’espoir de leur apporter de la consolation grâce à notre travail quotidien.

Cher(e)s ami(e)s, chère famille : si vous aviez vu toute cette beauté assasinée vous me comprendriez toute de suite. Cette belle négligence qui parcourt les bars et les cafés, l’assurance avec laquelle les jeunes se conduissent dans la rue, l’attitude sournoise et les sourires au coin des lèvres dans les visages des inconnus qui se croissent, cet humeur bon enfant des salles de concert, cette manière à Paris d’être une ville ouverte et au même temps mystérieuse.

Aujourd’hui, sur la route au boulot dans ma chère bibliothèque, je n’ai croissé que des regards basses ou qui réfletaient notre chagrin, notre envie de pleurer et de ne rien faire. Nous avons accepté résignés la présnece de guardiens à l’entrée et nous nous sommes prêtés à la révision de nos appartenances. Tous les habitants de Paris font des efforts, de toute évidence au-demà de leurs forces, pour continuer : un sourire un peu forcé, une courtoisie dans la porte un tout petit forcé, un coup de pied non réclamé ; aujourd’hui, ça vaut pas la peine de faire attention à ce genre de détails. Nous faisons des efforts pour nous imposer à la douleur.

Parisiens de tout le monde, il s’agit aujourd’hui de nous consoler. Il s’agit de nous accrocher à ce petit bâteau battu par les vagues mais qui réfuse de sombrer.

Aujourd’hui ça va mieux, entre des étudiants et des lecteurs dans la bibliotèhque. Au milieu du silence du seul combat qu’il vaut la peine de mener : celui de la pensée. Car il est vrai qu’il existe une vie après la mort et elle se trouve dans l’étude, dans les bibliothèques et dans les universités. Et Paris, avec ses parisiens de tout le monde et de tous les siècles, sait très bien ce que son histoire signifie et que là se trouve une partie à la réponse à notre chagrin.

Chère famille et cher(e)s ami(e)s, je vous embrasse et sachez que je pense beaucoup à vous, plus que vous ne l’imaginez.

Los quiere,

Pablo